Le traité de Finkenstein ou Finckenstein est une alliance conclue entre la #Perse (aujourd’hui l’#Iran) et la #France au château de Finckenstein, en Prusse-Occidentale, le 4 mai 1807.
Allié à la Grande-Bretagne, le shah de Perse Fath Ali voit dans la Russie une menace, notamment pour ses positions du Caucase. Il cherche à se rapprocher avec Napoléon Ier, alors en guerre avec la Russie. Il envoie à Finkenstein, où se trouve le quartier général de Napoléon, son ambassadeur Mirza Reza. Le 4 mai, un traité d’alliance entre la France et la Perse est signé.
Les relations Iran-Etats-Unis : Les premières années (XIXe et XXe siècles)
Eléments pour le cours de français langue étrangère (FLE)
Expression orale / Compréhension orale
Niveaux B2-C2 / Années 2020-2022
Résumé:
Ce texte revient sur les origines et les fondements des relations entre l’Iran et les Etats-Unis d’Amérique du Nord : de l’arrivée des premiers missionnaires occidentaux en 1830 à l’établissement des premières relations diplomatiques établies sous le règne de Nassereddine Shah Kadjar. Il propose également un aperçu des apports permis par les missionnaires protestants américains dans le domaine de l’éducation en Iran aux XIXe et XXe siècles.
Ce condensé a été rédigé dans le cadre d’un cours de français langue étrangère.
Anousha Nazari :De l’antique Hyrcanie à Paris – esquisse biographique
1990-2016 : formation et débuts artistiques
C’est à Sari, ville située entre les rivages de la mer Caspienne et les sommets de l’Alborz, capitale du Mazandéran, province du nord de l’Iran, qu’Anousha Nazari voit le jour, le 6 janvier 1990[1]. De son initiation originelle à la musique, la jeune femme confie avoir commencé à chanter à dix-neuf ans dans des orchestres locaux[2].
En 2003, âgée de treize ans, elle est inscrite à l’Iran Language Institute, où elle suit des cours d’anglais durant quatre ans. En 2008, elle entame des études d’architecture au sein de la Tabari University, établissement d’enseignement supérieur privé, à Babol. Elle en sortira quatre ans plus tard, diplômée d’un bachelor. Si les études universitaires l’occupent, Nazari ne néglige pas pour autant sa formation musicale, apprenant en parallèle la théorie musicale et le solfège à l’Harmony Music Institute entre 2011 et 2013. Au début de cette même année 2011, elle intègre le Sonata Philharmonic Orchestra & Choir Ensemble où elle occupe le poste de cheffe de pupitre (ou équivalant : soprano section leader, selon la terminologie anglo-saxonne…) ce qui l’amène à être « responsable de l’acquisition de l’art et de la technique du chant aux membres du chœur et coordinatrice de la section Soprano 2 du chœur » jusqu’au mois de septembre 2014. Les bases de la théorie et du solfège acquissent, Anousha perfectionne ensuite sa technique vocale, en suivant pendant un an, de 2013 à 2014, des cours de chant au Viziri Music Institute.
Entre 2011 et 2014, avec le Sonata Philharmonic Orchestra & Choir Ensemble, elle se produit également en concert dans différentes salles iraniennes à l’occasion de divers évènements musicaux et festivals, remportant au passage prix et distinctions : en juillet 2011, elle est à Reineh pour un concert donné à l’occasion de la cérémonie de l’environnement, passe en février 2012 par sa ville natale avant de s’arrêter à Téhéran pour la 27e édition de son festival international de musique. En mai 2012, cap sur Qaemshahr pour un concert donné dans un amphithéâtre. En février de l’année suivante, l’orchestre prend part aux mêmes évènements qu’en 2012 : prestation à Sari et à Téhéran. La participation à la 28e édition du festival international de musique de Fajr voit Anousha Nazari être désignée lauréate dans la section de chœur, ce qui sera à nouveau le cas lors de l’édition suivante de ce même festival qui se tiendra en février 2014. Entre temps, la formation passe, entre les mois de mars et aout 2013, successivement par les villes de Babolsar, Sari et Téhéran, se produisant notamment lors de la 5ème édition du festival international de musique de Résistance qui voit Anousha remporter un nouveau prix, toujours dans la section de chœur. Des distinctions qui lui vaudront d’être sélectionnée l’année suivante pour intégrer l’un des principaux orchestres symphoniques de son pays, l’orchestre
symphonique de Téhéran. A partir de septembre 2014, et durant un an, elle se consacre aussi à l’enseignement de la musique au sein de la Mahoor Music Academy.
De septembre 2014 à juin 2015 donc, Anousha est choriste dans l’orchestre symphonique de Téhéran, au sein duquel, sous la direction d’Ali Rahbari, elle se confronte entre autres à la Neuvième symphonie de Beethoven. Quelques mois plus tard, c’est un nouveau chapitre qui s’ouvre, Nazari choisissant de poser ses valises en Europe, avec pour point de chute la capitale française.
2016-2021 : arrivée à Paris et premiers efforts discographiques
Sur son choix de rejoindre l’Occident, la France et la Ville Lumière, elle dévoilera à l’occasion d’une interview :
« J’ai été attirée par la richesse culturelle et musicale de Paris et aussi en occident. Cette culture se développe chez les gens dans les écoles et dans les conservatoires qui permettent de découvrir la musique et de se perfectionner. Et puis on se nourrit aussi des rencontres avec les autres artistes»[3].
Ainsi, débarquée sur le sol français, on la retrouve inscrite à la Sorbonne et à l’Alliance française, où elle suit des cours de langue et littérature française. Elle intègre peu de temps après son arrivée le conservatoire à rayonnement régional de Cergy-Pontoise, où elle poursuit sa formation de chanteuse lyrique, (complétée par le suivi de différents atelier et autres masterclasses (dispensés notamment par Jeff Cohen, François Le Roux et Isabelle Philippe), avant d’en sortir en 2020.
Rapidement, elle commence à fréquenter quelques-uns des lieux culturels de la capitale, se produisant lors de récitals et prenant régulièrement part à différentes manifestations artistiques et musicales franciliennes. L’un de ces premiers projets est le spectacle musical Les noces de Rumi – La brulure d’amour, conçu et monté par le collectif Dervish Project. Pour l’occasion, elle chante ce soir du 16 décembre 2016 accompagnée par l’ensemble Hallajvashan[4]. Six mois plus tard, en mai 2017, elle livre une prestation à la Fondation des Etats-Unis, l’une des résidences de la Cité Internationale Universitaire de Paris lors d’un Rendez-vous musical. Elle est d’ailleurs lauréate de la Bourse de la CiuP pendant deux années consécutives.
Les 9 et 14 avril 2018, dans le cadre de la semaine culturelle d’Ispahan, deux concerts sont donnés. Le premier, « d’un paradis à l’autre », se tient à l’Hôtel de Lauzun et propose une improvisation de musique persane. Le second, « Ispahan dans la musique classique », se déroule dans l’enceinte du Musée de la carte à jouer. A l’occasion de cette soirée décrite comme intimiste, et donnant à entendre plusieurs morceaux pour piano et voix tirés du répertoire des musiques de chambre romantiques européennes et persanes, la chanteuse est secondée par le piano de Jeyran Ghiaee[5]. Les deux artistes devant se retrouver un peu plus tard.
Le 16 mai 2018, à l’auditorium Benito Juarez, elle participe à un évènement de musique classique. Le 3 avril de l’année suivante, pour la « célébration du printemps », à l’occasion de l’événement « Dialogue au Jardin Persan », une conférence-concert, dans l’amphithéâtre Richelieu de la Sorbonne, où récitation poétique et musique savante persane s’unissent , Anousha Nazari et Jeyran Ghiaee se retrouvent pour clore le programme. Le 12 juillet 2019, Anousha partage l’affiche de la seconde édition de « Tirgan, célébration persane de l’été » avec Sepand Dadbeh pour un « concert de dessin ». L’événement à lieu dans la cour des mûriers, à l’Ecole des Beaux-Arts[6].
Au mois de mai 2020, une vidéo proposant une version réarrangée pour voix, piano et clarinette de la célèbreDanse macabre de Camille Saint-Saëns est mise en ligne. Un enregistrement ou Anousha est accompagnée au piano par Sanaz Sotoudeh et Amin Ebrahimi à la clarinette. Le montage vidéo étant dû à Mathieu Sempéré [7]. Début juin, une nouvelle vidéo est mise en ligne est donne cette fois à entendre la ballade Buye-Juye-Muliyān, écrite par le poète du Xe siècle Rudaki, sur des notes de Rouhollah Khaleghi.
L’année 2020 voit aussi la chanteuse cofonder, avec Sina Abédi, chercheur-architecte , l’association Gondishapour, dont elle assure la direction artistique et qu’Abédi préside. De type « loi 1901 », Gondishapour est présentée comme « apolitique, non-religieuse, non-communautariste, œuvrant pour favoriser, développer et promouvoir la création scientifique, culturelle et artistique ; elle est indépendante de tout État, gouvernement, mouvement ou parti politique et courant religieux »[8] et se veut « une plateforme libre et flexible d’échange et d’interaction entre de multiples champs et disciplines où les sensibilités diverses et autonomes se forgent à travers différentes formes d’expérimentation ». Plus prosaïquement, Gondishapour apporte son concours à la création, la réalisation et la tenue d’événements culturels, scientifiques et artistiques divers (ateliers, concerts, conférences, colloques, expositions, festivals…) et cherche à développer à terme son versant « académique » grâce à des formations proposées dans les domaines des langues, la musique, la gastronomie, les arts plastiques, le cinéma, l’architecture et l’urbanisme[9], manière de renouer plus ou moins directement avec une part de l’antique identité perse et son héritage[10].
Gondishapour est à l’initiative de la première édition, en ligne, du Festival Nowrooz qui se déroule entre mars et avril 2021, du 21 mars au 2 avril. Une première édition dont l’idée a germée durant le confinement et dont la date de début marque l’entrée du calendrier persan dans un nouveau siècle (année 1400)[11]. Evoquant la tenue de l’événement, Sina Abédi déclare :
« Il commencera le 21 mars et s’étendra jusqu’au 2 avril. Nowrooz est inscrit à l’inventaire du patrimoine culturel immatériel en France depuis 2019, Cette fête est célèbre dans de nombreux pays ; on l’appelle aussi le Nouvel An persan et elle est fêtée de la Chine en Albanie, mais en fait dans le monde entier avec l’immigration. C’est une fête zoroastrienne et donc païenne, célébrée en Iran, mais on ne veut pas le cantonner aux Iraniens. Le nom de notre association rappelle cette université dans la Perse antique où tous les savoirs communiquaient entre eux, où les échanges étaient permanents. Les gens se sont rendu compte que les sciences n’étaient pas isolées les unes des autres. Le festival est né dans le contexte du confinement. Nous avons pensé que c’était le moment de lancer ce rendez-vous qui a un côté patrimonial mais qui se veut aussi culturel et créatif. Il se présentera comme une plateforme pour faire [se] rencontrer les gens. Notre but est de parler de culture autour de valeurs communes(…) »[12].
Résultat : treize jours jalonnés, entre autres, de conférences et concerts réunissant des intervenant d’une douzaine de pays et l’opportunité pour la chanteuse de commencer la promotion d’un premier album enregistré en mai 2020 et publié en ce jour de Norooz. Ce même 21 mars, à l’occasion des 30 ans d’existence de la rédaction persane de Radio France Internationale[13], Nazari entonne sur ses ondes les titres L’Hymne au temple du feu Karkouyehet Khosrow & Shirin, compositions de Sepand Dadbeh, écrites pour l’Ensemble Jansouz, dont il est le fondateur (ce dernier l’accompagnant au tambur ce jour-là).
Le 2 avril une brève vidéo annonçant la réalisation d’un clip illustrant Caravane, l’un des titres de l’opus, est mise en ligne, suivie, une dizaine de jours plus tard, d’une seconde dévoilant le titre du disque sur quelques notes empruntées au titre Your Two Braids. On nous annonce aussi la parution prochaine d’un clip vidéo pour le morceau Khosrow & Shirin, tourné dans l’enceinte du Musée national des arts asiatiques Guimet, à Paris[14].
Le mois d’avril 2021 voit enfin la sortie de la compilation 20 Chansons et Berceuses du monde, livre disque à l’attention du jeune public, rassemblant 20 titres chantés en 20 langues différentes par 20 artistes, produit par le label roubaisien Joyvox. Dans cette tour de Babel, Anousha interprète Lay Lay, une berceuse venue de sa région natale, évocation de la nature et des fleurs et célébration de l’amour maternel[15].
Collaboration avec Jeyran Ghiaee : Sounds Of Ancestors
Sounds Of Ancestors, opus longue durée sorti en mars dernier, ne parait pas sous le seul nom d’Anousha Nazari, la cantatrice étant accompagnée sur ce projet par la pianiste Jeyran Ghiaee. Sur cette dernière, la notice biographique contenue dans le livret nous apprend qu’ elle est née à Téhéran où elle entame l’étude du piano et sort diplômée du Conservatoire Supérieur de Téhéran. Elle s’installe en France au début des années 2000, s’inscrit à l’Ecole Normale de Musique de Paris où elle obtient deux diplômes : celui d’enseignement du piano et celui de concertiste de musique de chambre.
Elle devient ensuite répétitrice et travaille sur divers opéras et opérettes d’Offenbach (Pomme d’Api, La Périchole, La Grande Duchesse de Gerolstein, La Belle Hélène, La Vie Parisienne.).En 2014, elle décroche une certification en études musicales « Mélodies-Lieder » du conservatoire Hector Berlioz. L’année suivante, elle donne un récital dédié aux œuvres de plusieurs compositeurs iraniens contemporains, notamment Alireza Farhang. De 2016-2018, elle assure la direction des chœurs des hôpitaux de Paris.
Au Festival d’Avignon, auquel elle prend régulièrement part en tant qu’invité, elle reçoit une distinction du public, pour la production de l’operette Mr. Choufleuri d’Offenbach (2016). Elle enseigne ensuite au conservatoire à rayonnement communal de Limay, dans les Yvelines et accompagne sa chorale. Ghiaee officie actuellement comme répétitrice du chœur des Abbesses[16].
C’est en novembre 2020, à Paris, que Jeyran Ghiaee retrouve Anousha Nazari pour enregistrer les morceaux qui donneront corps à Sounds Of Ancestors, lors de sessions dirigées par Mathieu Sempéré. Le mixage et le mastering du disque sont dus à Pierre Braner et son habillage graphique à Mehrdad Mousavi. Notons aussi que Ce projet a été co-produit et publié par l’Université de Californie (UCI) et Le Samuel Jordan Center for Persian Studies & Culture, centre universitaire de recherche interdisciplinaire, basé à Irvine en Californie, qui regroupe des spécialistes de l’histoire, de la langue, de la culture, de l’art et de la littérature perses[17], en plus de ceux de Gondishapour et de la Saman Foundation.
C’est sur une adresse de Touraj Daryaee, directeur du Samuel Jordan Center que s’ouvre le livret de l’album. Quelques lignes dans lesquelles se conjuguent à la foi invitation, éloge et fierté et assurent l’auditeur de l’unicité tant vocale qu’artistique d’Anousha Nazari. Arrivent ensuite plusieurs notices. Dans l’ordre, celles des deux artistes et celles des quatre compositeurs dont les notes et la musique servent ici d’écrin aux mots des poètes perses (Saadi, Hafez, Baba-Tahir et Ferdowsi se répondant, dialoguant ensemble dans un mysticisme soufi confondant…), Jeyran Ghiaee jouant des partitions contemporaines d’André Aminollah Hossein, Morteza Hannaneh, Mohammad Saeid Sharifian et Samin Baghtcheban, certainement toutes originellement écrites pour soprane et piano.
Chacun des poèmes est présenté dans une traduction réalisée en langue anglaise. Une entreprise louable qui permet au plus parfait néophyte, à défaut de pouvoir véritablement saisir la portée, la beauté et la profondeur des différents textes chantés en persan, de se faire une idée du message véhiculé et de son caractère poétique intrinsèque. Ainsi, et contrairement à ce que nous faisons régulièrement, nous n’accompagnerons pas ici nos brefs commentaires d’extraits de textes traduits. En effet, toute traduction aussi juste, honnête et fidèle au texte originel soit-elle, n’est en mesure d’en restituer l’originalité, la singularité et la littérarité pleine et entière. Nous laisserons donc soin à nos lecteurs de découvrir et d’apprécier les textes chantés. Tout juste pourrait-on regretter que ne soit pas mentionné le nom du traducteur ayant commis celle accompagnant l’opus. Chacune des sept pièces se voit accompagnée en regard d’une miniature persane œuvre de Paul Zenker, illustrateur célèbre pour avoir travaillé dès 1920 à mettre en images certains des volumes de la collection « Epopées et légende » lancée par l’éditeur de livres d’Art Henri Piazza[18]. Pour la maison Piazza, Zenker illustre, entre autres, une traduction du Golestan de Saadi par Franz Toussaint, publiée en 1942 sous le titre Le Jardin Des Roses.
Sur le contenu de son album à paraitre, la chanteuse nous éclaire quelque peu en mai 2020 :
«Je suis en train de préparer un album qui associera des mélodies au piano de compositeurs persans actuels sur des poésies d’Hafez. Ce serait comme des lieds(…)[19]. »
D’une durée d’environ vingt-cinq minutes, Sounds Of Ancestors renferme sept titres, sept poèmes qui font se succéder, dialoguer et se répondre les lointaines rimes de Ferdowsi, Saadi, Hafez ou Baba-Tahir. Sept pièces sur lesquelles nous allons maintenant nous pencher.
Baguenaude en Perse ancienne
Un élément a particulièrement retenu notre attention lors de la première écoute de ce Sounds Of Ancestors : le minutage des différentes pistes indiqué au dos du livret. En effet, si celui-ci correspond avec celui indiqué par le lecteur pour les trois premières pièces, il n’en va pas de même pour les quatre autres, qui ont manifestement été gravées dans un ordre diffèrent sur le support CD. A titre d’exemple, le livret indique une conclusion sur un morceau de 3 minutes quand le lecteur affiche lui un septième et dernier morceau d’une durée de quelque 5 minutes et 10 secondes… Ceci, bien sûr, n’a aucune importance quant à l’écoute globale et continue de l’album, chacun des poèmes proposés ici pouvant être écouté et apprécié totalement indépendamment et pour lui-même. Moralité : avant de partir pour un voyage en terre inconnue, toujours prendre grand soin de consulter sa carte (ou son GPS)…
La production du disque se veut très sobre et discrète, sans artifice ou truchement apparent, le format proposé du piano-voix si prêtant particulièrement. On appréciera d’autant plus la maitrise dont font ici preuve les deux musiciennes et le lyrisme profus dans lequel baigne cette galette.
C’est sur la ballade The Candle Of Dawn, mise en musique d’un poème d’Hafez, que s’ouvre l’opus. Le titre débute par un joli motif musical à la simplicité apparente quoique feinte et de laquelle se dégage à l’écoute comme une impression perceptible de douceur. La composition de M.-S. Sharifian semble empreinte de quelques références occidentales et n’est pas sans évoquer, même, subrepticement, certains compositeurs de l’Europe de l’Est. Sur ce carreau vient vite se poser une voix de soprano dramatique pour une complainte chantée aux accents presque plaintifs, oscillant entre douceur, profondeur et tristesse. Cette impression première tient, selon nous, aux caractéristiques et fondements mêmes du lyrisme persan, son profond mysticisme, son caractère sacré supposé conjugués aux singularités intrinsèques de la langue persane. Une entrée en matière plutôt réussie, plage liminaire où le duo formé par Nazari et Ghiaee se complète à propos comme pour mieux délivrer la teneur et la couleur de ce qui va suivre.
A Hafez succède You’re The One I Desire, chanson folklorique déployée sur une composition due à Samin Baghtcheban et qui est aussi le titre le plus court de l’album, d’une durée d’à peine deux minutes. Une brièveté qui sert habilement une mélodie jouée sur un tempo relativement rapide et un piano donnant l’impression d’occuper un peu plus d’espace, d’être un peu plus incisif que précédemment. Le registre vocal est lui aussi légèrement différent, donnant à entendre des notes plus aigües. De ce titre se dégage comme une impression de nerveuse, sorte d’intranquillité.
Your Two Braids arrive ensuite, un poème de Baba Tahir déclamé sur des notes du même Samin Baghtcheban. Un titre au rythme lent, donnant à entendre un thème musical introductif sobre aux notes cristallines dont la répétition imprime au morceau ses accents de douceur et de sérénité qui efficacement contrastent avec le chant et la profonde mélancolie qui s’en dégage. Une tendre supplique et l’un des plus agréables moments offerts par cet album.
Dans une Caravane, nous rencontrons ensuite Saadi en compagnie d’André Hossein, le père du réalisateur et metteur en scène, bien connu de nous Français. C’est une mélodie aux notes et aux harmonies cristallines qui s’écoule lentement sur un peu moins de quatre minutes, tout juste remarque-t-on les quelques soubresauts joués en introduction, un peu plus tard répétés au milieu de la composition, sans que l’apparente pesanteur du morceau s’en trouve comme bouleversée. L’impression s’en trouve même renforcée par le chant, certainement l’une des plus jolies et efficaces prestations présentes sur le disque. Un moment des plus expressifs et poignants, où le dialogue entamé par les deux musiciennes est à son meilleur, et très idéalement placé au cœur même de cet opus. Un détail bien-sûr, mais qui n’est peut-être pas anodin, son efficacité s’en trouvant comme renforcée. Une chanson qui se verra prochainement accompagnée d’une vidéo réalisée par Reza Dehghan, à la sortie annoncée depuis quelque temps déjà.
l’étape suivante, Harp Tune, est la plus longue du périple (dépassant les cinq minutes) et est l’occasion d’entendre quelques vers de Hafez dans un nouvel écrin confectionné par Sharifian. Ce titre propose l’un des moments les plus bigarrés de Sounds Of Ancestors, tant les nuances donnent comme l’impression de se répondre, non sans harmonie. Discret, le piano livre une mélodie aux notes presque parsemées dont ce dégage une apparente douceur, mais dont se dégage malgré un sentiment de gravité, de tension. Le Chant lui aussi se retrouve dans cette même ornière , proposant une palette aux tons multiples, alternant émission de notes perçues comme tantôt graves, tantôts plus aigües. De quoi apprécier la richesse de sa tessiture. Se dégage tout de même de l’harmonie entre chant et musique un relent doux amer de profonde mélancolie, légèrement teintée de tristesse.
Premier des deux hommages proposés sur ce disque, la chanson Omaggio A Ferdöwci prend la suite. Comme le nom le laisse deviner se sont quelques rimes de l’auteur du Livre des Rois qui sont ici chantées sur un carreau musical ordonné par Morteza Hannaneh. Sur un peu moins d’une trentaine de secondes, c’est l’un des plus jolis et enjoués motifs introductifs du disque que l’on découvre. Sur ce morceau d’ailleurs, le piano semble s’affranchir quelque peu, se laissant entendre seul dans quelques interstices entre couplets. L’empreinte laissée par le chant donne à ce texte toute sa profondeur, sa gravité de complainte, de supplique.
Le voyage prend fin, toujours en compagnie d’Hannaneh, sur un ultime hommage, rendu cette fois à l’auteur du Boustan. Omaggio A Saadi se signale pour être l’une des pièces les plus brèves du disque, trois minutes à peine. De ces quelques minutes se dégage une étrange sérénité, un sentiment de plénitude, presque d’achèvement. Le but est atteint, le voyage prend fin et le recueil ouvert vingt-cinq minutes plus tôt lentement se referme. Sans doute est-ce là le souffle soufi et ce mysticisme sous-jacent, propre aux interprétations multiples du texte poétique persan, qui a l’oreille se manifestent sur cet ornement d’une sobriété confondante et ce chant aux les dernières notes évocatrices.
«That heart that used to be mine,
now goes with my love in your caravan. »
*****
Sounds Of Ancestors se révèle un intéressant mélange de concision et de faconde, l’une musicale l’autre littéraire, qui plaira en premier lieu aux amateurs de chant lyrique et de musique classique. A ceux-là se joindront bon nombre de persanophones de France et d’ailleurs et ceux nourrissant un quelconque intérêt pour la défunte Perse ou l’actuel Iran, leurs histoires, leurs cultures, leurs civilisations. Les autres pourraient, au premier abord, craindre de ne pas y trouver leur compte, sentiment légitime, tant se qui nous est proposé ici est singulier et peu très aisément et très vite dérouter, voire décontenancer, l’auditeur néophyte en la matière (le réfractaire pouvant lui, et sans problème aucun, passer son chemin). Ainsi, si certains regretteront peut-être de ne pouvoir comprendre ce qui est chanté en farsi (ce nonobstant la traduction fournie) et ne parviendront pas à en faire abstraction, d’autre au contraire prendront la tangente et transformeront l’altérité et sa frontière en occasion ; celle de vagabonder dans l’inconnu et le lointain, de voguer au creux des émotions que cette musique et ces chansons susciteront.
On ne peut rester totalement indifférent à ce qui est proposé ici, à ce qui en constitue la matrice originelle : une poésie ancienne et unique à l’expressivité riche, allègre et foisonnante. Bien que ses versants soufi et mystique aient pu rebuter certains de ceux ayant cherché à s’en approcher quelque peu et à la comprendre, nul besoin de considérations ésotériques et spirituelles pour, au final, apprécier l’écoute de cet album. La « poésie persane » dite classique qu’il renferme trouve ses origines quelque part entre les IXe et Xe siècles (Notre vieille Europe était encore en plein Moyen-âge…) et, si l’ancienne Perse a depuis longtemps disparu, sa symphonie poétique elle a survécu ; se développant et sachant se renouveler pour finalement nous parvenir. Elle a su comme s’insuffler dans le cœur de chaque Iranien pour y demeurer, d’une manière ou d’une autre, extraordinairement vivante et constituer l’un des creusets de l’identité iranienne actuelle. Cette poésie est de tout ce qui, aujourd’hui encore, demeure de la Perse le témoignage le plus vivace. Sounds Of Ancestors nous en propose un instantané non dénué d’honnêteté et constitue une agréable découverte.
Liste des pistes :
The Candle Of Dawn
You’re The One I Desire
Your Two Braids
Caravane
Harp Tune
Ommagio A Ferdöwci
Ommagio A Saadi
Anousha Nazari & Jeyran Ghiaee, Sounds Of Ancestors, WAOU Productions, mars 2021.
[10] L’Académie de Gondishapour était une académie universitaire, située dans la ville du même nom, qui fut, au cours de l’Antiquité tardive, le centre intellectuel de l’empire sassanide.
[11] Fête originellement zoroastrienne, le Nouvel An persan correspond, peu ou prou à l’équinoxe de printemps de notre calendrier grégorien. On le fête généralement chaque année entre les 19 et 22 mars. Beaucoup de Persans choisissent de faire de l’équinoxe de printemps de leur année de naissance leur date de naissance « officielle » sur le calendrier grégorien, ce qui explique pourquoi ils sont si nombreux à être nés les 20 ou 21 mars…
Cette fête est inscrite depuis le 30 septembre 2009 sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO. En France, c’est en 2019 qu’elle se voit inscrite à l’inventaire du patrimoine culturel immatériel en France, où elle est majoritairement fêtée en Ile-De-France et à Paris.
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